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22 juin 2012 5 22 /06 /juin /2012 18:30

Observations sur le principe de la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles

 

Il se subdivise en trois volets : réparation intégrale - versement  d'indemnités - évaluation ''in concreto" des préjudices.

 

a)    cela veut dire que le montant des réparations ne doit pas être inférieur aux préjudices subis ce qui n’est quasiment jamais vrai en matière d’accident du travail et de maladies professionnelles. Les victimes subissent donc une discrimination : néanmoins, le Conseil Constitutionnel vient de décider le 18 juin 2010 qu’il n’y a pas inégalité des citoyens devant la loi avec une réserve importante qui laisse des portes ouvertes

 

b)    si le principe est relativement simple à appliquer sur des préjudices patrimoniaux - il en va autrement pour les préjudices dits " extrapatrimoniaux " notamment les préjudices moraux ; dans ce cas, l'argent ne répare rien : il constitue le seul moyen de donner à la victime une indemnité « satisfactoire »

 

c)    l'indemnité doit réparer tout le dommage sans constituer un enrichissement personnel ni constituer une sanction pour qu’on ne recommence pas

 

d)    il y a une espèce de hantise de la double indemnisation, mais jamais de la faiblesse de l’indemnisation

e)    on ne peut par ailleurs jamais réparer deux fois le même préjudice ; par contre on peut cumuler les indemnités issues de la RC  et les prestations issues d'un contrat ( pas de cumul entre le délictuel et le contractuel normalement )

 

f)    on ne peut normalement tenir compte ni de la gravité de la faute, ni des facultés contributives du responsable, ni de l'existence d'une assurance, ni du profit que tire l'auteur de l'activité dommageable. Ceci n'est respecté que relativement par les juges

 

g)  le droit civil, quand il répare, n’a pas de fonction punitive : à la limite on peut détruire ou détériorer  ce que l’on veut du moment que l’on répare le dommage. On ne peut donc demander plus pour faire expier l’auteur ou pour l’inciter à ne plus recommencer

 

h)    le principe de l'évaluation in concreto impose aux magistrats de procéder à une personnalisation du dommage : cela s'oppose aux évaluations forfaitaires à partir de barèmes préétablis qui ne peuvent être qu'indicatifs : les tentatives  répétées de prévoir des harmonisations, des barêmes, des nomenclatures ont tous échoués à ce jour – Mais nouvelle tentative : proposition de loi de Guy Lefrand sur l’indemnisation des victimes de dommages corporels à la suite d’un accident de la circulation  qui vise en réalité tous les dommages – pronostic : vouée à l’échec comme les autres surtout après la décision du conseil constitutionnel

 

- Dynamisme du principe de réparation intégrale

 

a)    il s'adapte au progrès technique et aux modifications des données sociales de la réparation

b)    il permet la découverte et l'indemnisation de nouveaux préjudices  même s'il y a  toujours des critiques quant au caractère fictif de l'indemnisation soit-disant intégrale notamment pour les préjudices très graves lorsque la personne n'est plus consciente

c)    dernier en date : la réparation du préjudice d’angoisse devant les CP 

d)    autre question  discutée  par la doctrine : la mort doit – elle être indemnisée au titre d’une perte de chance de vivre ?

 

 

 

- Critiques du principe de la réparation dite intégrale :

 

·         irréaliste

·         manque de souplesse

·         pas de prévision possible sur un équilibre recette / dépense car traitement individualisé

·         pas de prise en considération de la gravité de la faute ( pratique de la recherche de « poussières de faute » )

·         certains considèrent qu'il s'agit '' d'une dangereuse vue de l'esprit" et dénoncent "l'idéologie de la réparation et ses méfaits"

·         on propose souvent le remplacement par des barêmes qui lieraient les juges

·         interrogation sur le caractère réparable de certains préjudices

·         risque de dédouaner  moralement celui qui peut se permettre de causer un préjudice et  qui peut réparer. La réparation intégrale peut être contre-productive si elle permet à l'auteur du dommage d'être quitte vis à vis de la victime

·         culte de la « victimologie »

 

 

Les évolutions récentes

 

o   On est face à une « poussée » du ministère, des compagnies d’assurances et des employeurs pour « forcer » les juges à se prononcer par type de chefs de demandes

o   La loi de 2006 sur le recours des tiers payeurs à bousculer le système est commence à avoir de sérieuses répercussions sur le droit des accidents du travail

o   La prochaine étape devrait être de systématiser les barêmes mais c’est problématique au regard de la Constitution

 

 

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6 mai 2012 7 06 /05 /mai /2012 00:50

Cette distinction  fonde toute méthodologie  qui se veut un peu claire de l’indemnisation.

 

Or dans le langage courant,  on  énonce volontiers comme synonymes les termes de « dommage » et de « préjudice »

 

Dans le droit de la  réparation, cette fausse synonymie est sans  doute à l’origine de la confusion qui règne dans la réparation du dommage corporel.

 

 

– Le « dommage » relève du fait, de l’événement qui est objectivement constatable,  et qui demeure au-delà du droit.

 

Judicieusement les assureurs opèrent la classification des « dommages » en trois  catégories de faits :

 

  •  les dommages corporels qui sont définis comme « toute atteinte à l’intégrité physique ou psychique de la personne » ( avec l’ambiguïté sur la notion de corps)
  • les dommages matériels qui s’entendent de l’atteinte à l’intégrité physique ou à la substance d’une chose ;
  • les dommages immatériels, dits « purs » en ce qu’ils ne résultent ni d’un dommage corporel, ni d’un dommage matériel, notamment dans les affaires économiques et financières.

 

 

Le « préjudice » relève du droit : il exprime l’atteinte des valeurs : l’atteinte  aux droits subjectifs patrimoniaux  ou extra-patrimoniaux qui appellent une réparation dès lors qu’un tiers en est responsable. Le préjudice marque le passage du fait (le dommage) au droit (la réparation). Le « dommage », corporel, matériel ou immatériel, peut rester hors de la sphère juridique, notamment pour le dommage causé à soi-même : tentative de suicide – accident dont on est responsable – avortement…. il peut y avoir  « dommage » sans « préjudice ». Par exemple le salarié accidenté subit toute une série de dommages ( gênes dans la vie courante – perte de salaire – cicatrice – perte d’intérêt pour les choses de la vie … ) qui ne donnent pas lieu à réparation donc le préjudice n’est pas chiffré. En revanche, tout « préjudice » a sa source dans un dommage.


 

 

La notion de « dommage corporel » :« atteinte à l’intégrité physique  et/ou psychique de la personne humaine »

 

Cette définition a été forgée par les médecins. En effet, ce sont les médecins de médecine légale et de dommage corporel qui ont pour fonction de procéder à « l’expertise médicale », car le « dommage corporel » relève d’une constatation médicale.

 

Le rôle du médecin-expert est d’objectiver et de quantifier les séquelles, et d’en déterminer l’imputabilité à l’accident ; c’est une fonction de constat du dommage corporel, limité à son évaluation médicale. La tradition française  sépare nettement la fonction expertale de la fonction juridique de fixation des dommages-intérêts : il ne faut pas confondre l’évaluation médicale qui revient au médecin et l’évaluation indemnitaire qui relève du magistrat ou du régleur : dans le droit des AT les médecins ont pris l’habitude d’occuper les deux terrains, notamment au travers du barême qui renvoie à un taux d’IPP adossé au salaire.

 

Le « barème médical »  est étalonné en pourcentage de taux d’incapacité fonctionnelle  (dite IPP : incapacité permanente partielle) permet de donner une mesure chiffrée des atteintes à la personne médicalement constatables (ou explicables).

 

En revanche, un « barème d’indemnisation » se situe dans le domaine du droit : en fixant une valeur monétaire au pourcentage de taux d’incapacité ;

 

S’il est obligatoire, il nie le  pouvoir souverain du juge du fond en assujettissant l’indemnité à  l’évaluation expertale : il subordonne le juge à l’expert, ce qui est inacceptable  dans la tradition juridique française. Il est aussi inacceptable pour les victimes  dont il dénie l’irréductible singularité de toute personne humaine

 

C’est pourquoi les barêmes sont dits indicatifs même s’ils sont suivis en fait par beaucoup de magistrats

 

La personnalisation  de l’évaluation indemnitaire des préjudices, notamment des préjudices extrapatrimoniaux, est une donnée traditionnelle de la jurisprudence française en matière de dommage corporel, sauf dans le droit des AT, mais une évolution très récente se dessine dans ce sens.

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